mercredi 28 septembre 2011

C'EST LA GUERRE, BOUTONS 'LOUIS PERGAUD' 1/2


C’est la guerre, boutons Louis Pergaud hors du monopole de ses ayants droit !  La semaine dernière, Calimaq a soulevé une question intéressante sur Twitter quant à l’appartenance ou non de l’oeuvre La Guerre des Boutons (dont déjà une version cinématographique est déjà diffusée en salle à ce jour) de Louis Pergaud au domaine public. En effet, en droit français la durée de soumission des oeuvres aux droits patrimoniaux (i. e. de diffusion, de reproduction, d’interprétation et de représentation) d’un auteur dont héritent ses ayants-droits après sa mort varient en fonction de divers critères dont la date de la mort du dit auteur et des conditions de celle-ci. Nous verrons plus loin qu’il faut aussi prendre en compte la date de publication de l’oeuvre pour lui attribuer ou non des durées supplémentaires dites « prorogations pour faits de guerre ».
De la guerre des boutons. Par Petit_Louis. CC-BY-NC-SA. Source : Flickr.
Avant de proposer mon propre calcul de cette durée dans le cas de Louis Pergaut, je vous invite à lire l’article publié par Actualitté sur son site web. Son auteur présente une analyse juridique intéressante de notre cas. Je le remercie par ailleurs pour cet article qui m’a poussé à me pencher moi aussi sur la question.
Tout d’abord, je vous avertis que je ne suis par juriste et que mon raisonnement ne vaut sans doute pas celle d’un expert en la matière. Je vais toutefois m’efforcer d’être rigoureux dans mon analyse et clair dans mes propos.
Pour calculer la durée d’application sur l’oeuvre d’un auteur de ses droits patrimoniaux, il a longtemps suffit d’additionner différents délais accordés par le législateur. Depuis la loi du 27 mars 1997, la situation est différente et le calcul n’est plus le même. Nous verrons par la suite si le cas de Louis Pergaud appartient à l’ancien régime juridique ou au nouveau. En effet, une des clés du problème réside dans l’application d’un système ou d’un autre.

Avant l’harmonisation de la législation européenne sur l’entrée des oeuvres dans le domaine public

Jusqu’à la loi du 27 mars 1997 qui a transposé la directive européenne 93/98/CEE du 29 octobre 1993 en droit français, le délai de soumission des oeuvres au monopole des ayants-droit courrait jusqu’à 50 ans après la fin de l’année civile de la mort de l’auteur, il s’agit de l’ancien article L123-1 du Code de la Propriété Intellectuelle (CPI) en vigueur du 3 juillet 1992 au 1er juillet 1995.
A cette durée de 50 ans devaient s’ajouter des prorogations de guerre. Il s’agit d’une durée accordée par les législateurs aux ayants-droits afin de compenser le manque à gagner subit durant les périodes de Guerre Mondiales au cours du XXième siècle. Ces prorogations sont accordées par les articles L123-8 et L123-9 du CPI. Pour plus de détails, je vous invite à consulter la page Wikipedia dédiée à ce sujet et dont je me suis inspiré pour faire cette analyse.
Les oeuvres de Louis Pergaud avaient été publiées avant le traité de paix de la 1ère Guerre Mondiale (voir détails plus bas) (art L123-8) et donc avant le 13 août 1941 (art L123-9) et n’appartenaient pas non plus au domaine public avant le 3 février 1919 et avant le 13 août 1941 (mêmes articles respectifs).
→ Les ayants-droits bénéficient de prorogations de guerre de 14 ans et 272 jours (soit 5386 jours) (source : Wikipedia).
 Détail du calcul :
Toujours selon Wikipedia, les derniers traités de paix qui ont officiellement mis fin à la Grande Guerre (Traité de Trianon et Traité de Sèvres) ont été signés en 1920. Or, contrairement à l’article L123-9 qui précise que la prorogation de 2nde Guerre Mondiale doit être égale au temps écoulé entre le 3 septembre 1939 et le 1er janvier 1948, l’art L123-8 parle du « temps écoulé entre le 2 août 1914 et la fin de l’année suivant le jour dela signature du traité de paix pour toutes les oeuvres publiées avant cette date et non tombées dans le domaine public ».
On peux donc considérer que la prorogation relative à la 1ère GM doit être calculée selon la durée la plus longue donc en prenant en compte les derniers traités de paix conclus : ceux de Trianon et de Sèvres en 1920.
 Une durée de 6 ans et 152 jours s’est bien écoulée « entre le 2 août 1914 et la fin de l’année […] de la signature du [dernier] traité de paix [engageant la France dans le conflit] ».
On ajoute à ce nombre les 8 ans et 120 jours qui séparent le 3 septembre 1939 et le 1er janvier 1948 mentionnés dans l’article L123-9 pour obtenir 14 ans et 272 jours de prorogations de guerre.
En plus de ces prorogations de guerre, il faut aussi noter l’existence d’un autre délai de 30 accordé aux ayants-droits d’un auteur lorsque celui-ci est dit « Mort pour la France » (article L123-10 du CPI).
Il est temps à présent de faire un premier calcul pour estimer à combien s’élevait le délai de soumission des oeuvres de Louis Pergaud au monopole de ses ayants-droits AVANT que l’Union Européenne décide d’harmoniser les différentes législations.
 L’auteur est :
  • mort en 1915 :
    → Date de fin de monopole : 50 ans après la fin de l’année 1915 (donc à compter du 01/01/1916)
  • mort pour la France :
    → 30 ans de prorogation car l’auteur est mort pour la France.
  • prorogations de guerre
    → 14 ans et 272 jours pour les deux guerres mondiales
 1916 + 50 + 30 + 14 ans et 272 jours = 2010 et 272 jours.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire